L’écriture est retournement

« Il y a en moi une préoccupation fondamentale. D’ailleurs, elle ne m’est pas propre. Au fond de tout individu, cette préoccupation est plus ou moins présente. On a à devenir soi-même, car être soi ne va pas de soi. Être soi ne nous est pas donné. Tout ce que j’écris peut se ramener à cette nécessité. J’ai à devenir moi-même. Pour devenir moi-même, j’ai dû détruire celui que les circonstances avaient fait de moi, puis aller à la rencontre de cet inconnu que j’étais et qu’il me fallait faire entrer en existence. Tout mon travail, depuis quarante ans que j’écris, a été déterminé par ce besoin-là : devenir moi-même. Devenir soi-même peut parfois être une longue aventure, fort douloureuse. Cela entraîne de telles remises en cause, de tels bouleversements… En effet, cet œil intérieur à l’aide duquel on cherche à se percevoir, il fait partie intégrante de ce qu’il a à observer. Par là même, toutes ses perceptions dénaturent ce qu’il appréhende. Pour que ses perceptions ne soient plus viciées, le regard doit s’inverser, puis épurer l’œil dont il émane, afin de l’affranchir de ce qui conditionne sa vision. Autrement dit nous avons à connaître ce à l’aide de quoi nous cherchons à nous connaître. »

Charles Juliet (propos recueillis par Philippe De Jonckheere et Jacky Chriqui)  

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