« La poésie est un état plénier, hors beauté, hors sentiment, hors translation. Le seul apanage de l’écrivant est le coup de projecteur personnel porté sur cet état qui le précède et le suivra. (…) La poésie n’existe pas à prendre à la louche, la petite cuillère, ou avec de grands mots. Elle n’existe pas plus que le temps, l’éternité ou tous les absolus. Ce qui existe c’est la façon de vivre dans le décor à traverser, à désigner, et à ensemencer par telle ou telle mise en exergue. Nous sommes ce que nous choisissons de percevoir. Le regard, la pensée, l’action, exercent l’être et la maison que nous y construisons. Cet être désigne, détermine, modèle ce qui est. On ne dégage de la vie que ce l’on y voit. Dans cette roue pérenne de changement perpétuel, chaque instant partage un univers qui existe sans nous mais que nous donnons à voir à la manière de Michel Ange : J’ai vu un ange dans le marbre et j’ai seulement ciselé jusqu’à l’en libérer. »
Ile Eniger