Je ne me cherche pas où brillent
les feux extrêmes du langage
signaux des fêtes somptueuses
que d’autres donnent dans leurs mots
Les miens glissent sans laisser trace
autour de leur propre miracle
Les miens, la fraîcheur d’un outil
en est l’enclos redoutable
Les miens, quel alcool les échauffe
mieux que le rythme d’une artère
et quel orage les foudroie
mieux qu’un trille de l’alouette ?
Je vis du soleil que les arbres
emprisonnent pour tenir tête
au vertige de leurs racines
Je divulgue l’envers d’un chant
si je vois que le ciel s’y perd
comme une piste dans le sable
J’habite la fièvre de l’homme
quand le froissement d’une robe
façonne sous ses doigts la houle
d’un fleuve au cours imprévisible
Ma vie offerte sans cesse
à la bise de mes impasses,
cent fois j’ai voulu que leurs ombres
me séparent de mon poème
mais toujours la sente escarpée
qu’entre les cils ouvre un sourire
le menait vers un nouveau sacre
Ma faim commence où l’âtre crée
d’une flambée la chair des murs
Mes mains apprennent leur chaleur
aux frontières d’une écuelle
Je dis « j’ai chaud » pour qu’un brin d’herbe
définisse l’été de tous
Je dis « source » pour que la peur
du cerf altéré les concerne
Ma vie à jamais livrée
aux exigences de ma voix
comme à l’aube le condamné
aux premiers pas d’un corridor,
Ma voix j’ai besoin pourtant
qu’il fasse clair loin de mes lèvres
Paul Chaulot