« J’entre ce soir dans la maison déserte, sous les pins.
L’ombre a tout saccagé. Cependant, je reviens
(…)
Voici le chemin pluvieux et la barrière blanche
Et le sol tapissé d’épaves et de branches ;
Quelqu’un m’attendait là : un visage de sable,
Quand je rentrais, traquant une meute d’étoiles.
Je t’appelle, visage, et voici que le vent
Chante, comme il chantait sous les pas du printemps.
J’ai franchi tant d’espace et rompus tant de liens
Que je ne sais plus trop qui je suis, d’où je viens ;
Cependant une main invisible me guide.
Est-ce vrai qu’on ne peut rompre la chrysalide
Et ramener à soi le cœur évanoui
Qui erre et se disloque au travers de la nuit ?
Je l’ai quitté ici et nous avons vécu,
Apaisant notre faim d’un froment inconnu,
Mais je l’entends toujours ricocher et sombrer
Dans un pâle silence aux frontières murées.
(…)
Ô mes saisons perdues et mes lampes éteintes,
C’est une voix en vous qui gravite et qui tinte,
C’est un regard absent qui vous livre un secret
Maternel, enrobé de ténèbres et de craie. »
Michel Manoll