« Un poème, un arbre. Dans un premier temps, à l’état de brouillon, tout semble confus, le poème emprunte à tâtons de nombreuses directions, il va trop vite ou trop loin, il revient en arrière, et pourtant, si nous le laissons faire, même en accumulant les variantes, il croît et il s’élève. Il faudra prendre du recul, non pas pour diriger le mouvement, mais pour que se révèle son dessein secret. Ce travail, qu’il ordonne, est délicat. Nous ne disposons d’aucune méthode : comment intervenir afin de dégager le poème de ce qui l’étouffe, à quel instant cesser d’intervenir ? Mais nous n’avons pas en vain regardé les arbres, nous avons appris de leur fréquentation qu’ils ne se dressent que s’ils n’encombrent pas l’espace : en le faisant rayonner, ils rayonnent. Tel est le principe de leur beauté. Ne prenons soin que de l’élan, veillons à ne pas l’altérer en fonction d’un idéal préconçu, le poème infaillible ira vers l’épure : de tous ses mots il frémira, il s’épanouira. Chaque poème est unique, tous sont chez eux dans la forêt. »
Pierre Dhainaut