« Dans les rues devenues trop courtes
(…)
Tout est vide
L’esprit prend l’air
Le cœur a dégorgé ses pires sentiments
Le vent passe partout à travers les rainures
Qui me séparent des servitudes de mes sens
Le désert sans lumière où s’étire la caravane des silhouettes désirées
Le ciel pesant d’où tombe la neige noire de l’oubli
(…)
A travers les chemins qui ne sont tracés qu’en arrière
En marchant vers les pays connus qui deviennent méconnaissables
Les visages sans nom qui se précisent
(…)
Tout ce que l’on croyait être et qui n’est pas
Tout ce dont on avait toujours douté qui vous fait vivre
Contre le courant rapide de nos forces
La chaleur qui se perd
Le sang se décolore
Il est difficile de tenir debout contre cet autre vent
Le vent qui vient de loin
Derrière les palissades
Sous les murs écroulés couverts de repentirs
Tant d’échos déformés par les vicissitudes
Tant de mensonges plus forts et plus vivants que la réalité
Pleins des tremblements savoureux de la crainte
Quand les mains en avant protègent les secrets
Quand on fuit à travers l’écheveau des fils cassés
Les rochers aux lames acérées de la discorde
Quand on referme violemment la porte sur la nuit
Il n’y a plus à placer là que le murmure
La seule clef sans bruit qui force la serrure
Entre l’aveu confus et le lien du mystère
Les mots silencieux qui tendent leur filet
Dans tous les coins de cette chambre noire. »
Pierre Reverdy