Lieu du regard

« Quand le regard déchaîne un torrent spatial qui emporte ma face et mon dos pour m’unir, non pas à une figure en soi restrictive, mais à l’énergie spatiale à jamais courante. Et tout s’accélère dans une perdition de l’identité… Perdition devenue l’essence du plaisir de voir puis du plaisir d’écrire, qui eux aussi déclenchent (parfois) l’unité des espaces intérieur et extérieur en me plongeant dans l’oubli de tout ce dont m’écarte leur activité.

(…)

L’état de grâce lié à la pratique religieuse n’eut pour effet que la rupture avec le contexte qui l’avait préparé tandis que la grâce liée au regard peut, une fois connue, se convoquer à volonté. L’observation du lieu du regard, de son volume et de son élément, m’occupe depuis je ne sais depuis quand faute de repères, m’occupe en tout cas depuis que j’écris.

(…)

Parallèlement à l’espèce, la langue est la seule autre transcendance indubitable, et que toutes deux nous pénètrent par le bas au lieu que les sornettes divines empalent verticalement notre cerveau… Reste qu’en se croisant, la langue et l’espèce dégagent à leur point d’intersection des moments de grâce. »

Bernard Noël

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