Vous franchissez le passage

« Un matin, après des jours ou des mois désertiques où vous étiez si inhabité, si pauvre que la lumière ne vous venait plus que d’une étoile morte, que votre peur et votre espérance semblaient la peur et l’espérance d’un autre, un matin vous vous éveillez avec un rythme dans la tête, une phrase, le monde bouillonne, vous franchissez le passage, il faut écrire, écrire. (…) Peut-être n’avait-il rien à voir ce royaume qui semblait tenir à un rythme, à des formes, à une phrase, à une image obsédante que ne pouvait effacer l’aube, peut-être n’avait-il rien à voir avec celui que promet la foi à quiconque demeure fidèle, ni avec cette aspiration ultime du cœur et de l’esprit qui nous tire de la contingence, car il est étranger aux sens et à l’imagination, nada, vide avant d’être plénitude, mais cette zone de paix dans l’œil du typhon était un pressentiment, une allusion et sans doute une promesse aussi réelle que l’angoisse, plus virulente que le désespoir. »

Jean Sulivan

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