« Je suis cet homme nu qui marche dans la nuit,
Funambule obstiné, mémoire de la terre.
Je marche sur les fils tendus entre les astres,
Poème dont les mots recomposent un corps.
De l’homme je n’ai plus que sa raison de vivre.
La nuit c’est la musique invincible de l’âme,
C’est l’ombre d’un oiseau qui cherche où se poser,
C’est aussi bien le jour s’il y avait un jour.
Je chante sur les toits envolés de l’amour.
J’ai tout perdu, le vent et l’or de la verdure,
La chair et ses glaïeuls, l’herbe des habitudes,
La complaisance et le sourire des rivières,
Le pain, le vin, les fruits bleus de la rêverie,
Le jardin retrouvé des rondes enfantines.
J’ai tout perdu, l’orgueil insensé de la science
Quand la terre éclata comme un fruit d’impatience.
Des hommes devenus poussière purulente
Que reste-t-il hormis ce chant que nul n’entend.
Sur mon chemin perdu j’ai semé tant de miettes
Que je pourrais nourrir tous les oiseaux du monde. »
Pierre Mathias