« J’ai appris, en ces années cruciales, à être seul. J’entends par là : aborder par mes propres lumières les choses que je veux connaître, plutôt que de me fier aux idées et aux consensus, exprimés ou tacites, qui me viendraient d’un groupe plus ou moins étendu dont je me sentirais un membre, ou qui pour toute autre raison serait investi pour moi d’autorité. Des consensus muets m’avaient dit, au lycée comme à l’université, qu’il n’y avait pas lieu de se poser de question sur la notion même de volume, présentée comme bien connue, évidente, sans problème. J’avais passé outre, comme chose allant de soi… C’est dans cet acte de passer outre, d’être soi-même en somme et non pas simplement l’expression des consensus qui font loi, de ne pas rester enfermé à l’intérieur du cercle impératif qu’ils nous fixent – c’est avant tout dans cet acte solitaire que se trouve la création. Tout le reste vient par surcroît. »
Alexandre Grothendieck