« Dire est un travail, une application. Les phrases restent en deçà. Les mots fatigués traversent des turbulences, ils éclatent parfois comme des coques vides. La faim me prend d’autres fruits, autres issues, autres lieux. Le moindre frémissement d’air, l’appel du plus haut, la pérennité d’éphémères saisons, agitent mes bouts d’ailes. Un éblouissement confiant recueille chaque pensée, chaque mot, garde les plus fiables. Je choisis ce qui remonte à la source, accompagne au delta. Justesse à épouser, ma rectitude, librement consentie, guide mon poignet, mon épaule, mon écriture, mon souffle. Exactitude native, je tiraille de la machinerie humaine à l’éloquente présence. Déterminée par une intégrité dont je sais l’immanence sans connaître la forme, je vais aux mots comme à la vie, dans la lueur d’une lampe instinctive. »
Ile Eniger